Boulanger biopunk


Le concours 2015 du meilleur boulanger bio au Québec vient de mettre en lumière des boulangers qui maitrisent parfaitement les techniques de panification de diverses farines biologiques (blé, khorasan, épeautre, etc.). Il n’était ici certainement pas question de valoriser ou récompenser celui qui fait cuire des baguettes congelées, fabriquées en masse dans une usine, toutes identiques et uniformes, clones infinis quelque soit le jour et le lieu…

Organisation sans faille, juges prestigieux, boulangers chevronnés, meunier innovant : tous les ingrédients ont été réunis pour que les amateurs de bon pain santé soient ravis et rassurés quant a l’avenir de la profession de bon boulanger. Les pains primés répondaient à des critères précis de longueur, poids, volume, gout, esthétique, créativité, texture qui permettent de juger des opérations de pétrissage, division, façonnage et cuisson effectués par les candidats.

Cependant si on compare visuellement les types de pains réalisés, force est de constater que c’est l’aspect esthétique dit « boulangerie traditionnelle » qui a été privilégié par le jury : ils ont choisis des pains avec des motifs élaborés, des formes sophistiqués, et des ingrédients complémentaires originaux : ce ne sont pas des pains que vous verrez tous les jours chez votre boulanger artisanal.

Alors vous me direz qu’il est bon que l’élite boulangère s’affronte sur des exercices de style.

Mais est-ce bien la direction à suivre pour une boulangerie qui utilise de la farine biologique ?
Biologique, cela signifie nature et santé pour nous tous, c’est surtout une farine exceptionnelle à travailler manuellement. Elle n’est pas facile à pratiquer tous les jours car les lots de farine peuvent être de nature très variable. Cette farine exige de son boulanger qu’il s’y adapte au quotidien, selon les humeurs du produit naturel, non trafiqué, non standardisé, non uniformisé.

Elle donne des pains brut de fonderie, sans tralala, avec des belles couleurs, qui tirent le meilleur profit de l’odeur et de la saveur des céréales usitées,

Elle permet de fabriquer des pâtes (à pain) de qualité, avec une force qui oscille en permanence entre ténacité et souplesse,

Elle renoue avec ses racines paysannes pour fabriquer des pains santé en ville.

Elle est un peu PUNK, en rupture avec la boulangerie industrielle du pain tranché omniprésente au pays.

Et si l’avenir de la boulangerie c’était tout simplement une meilleure alimentation, produite localement avec de la farine biologique par un boulanger artisanal, et accessible à toutes les bourses.

Ni traditionnelle, ni industrielle, à dimension humaine, elle donnerait du corps à notre société.

Alors pour paraphraser THE CLASH, le boulanger de cœur que je suis vous dit « le pain n’est pas écrit ».


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